La renaissance du « Méridional »

Rédigé par Constantin LIANOS le . Publié dans Culture.

        La renaissance du « Méridional »

La renaissance du « Méridional » ?

C’est une blague ?

Non, c’est très sérieux. Un journal ne meurt jamais parce qu’il s’imprime aussi dans la mémoire des vivants.

« Le Méridional » a disparu des kiosques le 4 juin 1997. Ce jour-là naissait un journal hybride, ni bleu ni rose, intitulé « La Provence », résultant de la fusion du « Provençal » et du « Méridional ». C’était le mariage de la carpe et du lapin. Une mésalliance qui s’est traduite par une baisse assez nette du lectorat bleu et du lectorat rose. De grands stratèges parisiens s’imaginaient que l’addition des deux titres permettrait de gonfler les ventes et elle s’est soldée par une soustraction des lecteurs. Bref, un vrai fiasco.

A partir de là, la presse marseillaise est entrée en hibernation.

Le mariage forcé des nationalistes et des progressistes a engendré une sorte de monstre insipide s’inscrivant dans l’air du temps. Les lecteurs assidus du « Méridional » auraient pu porter plainte pour viol idéologique caractérisé et brisure de croyances. Ils ne l’ont pas fait. Orphelins de leur titre favori, ils se sont contentés de regarder leurs ennemis d’hier se décomposer au fil du temps et se diluer dans le magma mondialiste. Délicieuse vengeance passive. Les socialistes et les communistes, pourtant largement soutenus par les médias, ont bu le calice jusqu’à la lie.

Le « Méridional » a disparu contre son gré mais son âme a continué à vivre comme une petite lumière qui survit dans la nuit. L’acteur Roland Giraud, meurtri par le décès criminel de sa fille Géraldine en 2004, aimait confier à ses proches : « les morts ne sont pas absents, ils sont juste invisibles ». Il avait raison. Le « Méridional » était juste invisible. Et l’audace conjuguée d’un jeune entrepreneur de trente-trois ans, Jean-Baptiste Jaussaud, qui a eu l’ingénieuse idée de racheter le titre, et celle d’un ancien directeur de banque très avisé, Francis Papazian, lui permettent aujourd’hui de renaître de ses cendres.

En ma qualité d’ancien journaliste du « Méridional » (j’y ai travaillé durant onze ans avant d’être remercié par les crypto-socialistes qui en avaient pris les rênes), je mesure la responsabilité qui m’incombe : celle de faire jaillir la flamme de cette résurrection dans les cœurs blasés de nos anciens lecteurs et susciter une adhésion nouvelle dans la jeunesse qui en a assez d’être perfusée du matin au soir à la propagande diversitaire et ne veut plus être soumise à l’empire du politiquement correct.

L’idéal du « Méridional » n’a pas changé depuis qu’il est entré en dormition, il y a vingt-trois ans. C’est le journal des patriotes humanistes, ceux qui rêvaient et rêvent toujours d’une grande alliance de toutes les composantes de la Droite française pour faire pièce à l’oligarchie et à l’européisme béat. Notre objectif, à nous, c’est de voir naître enfin l’union des souverainistes, des orléanistes, des libéraux et des nationalistes sous une bannière commune fondée sur un socle de convictions communes et un « programme commun », façon Mitterrand et ses 110 propositions en 1981.

Le « Méridional » était et sera farouchement attaché à la liberté d’expression parce que c’est la base même de toute démocratie populaire. Ici, nous exécrons la censure et aucun de nos écrits ou des vôtres ne sera la proie des ciseaux d’Anastasie. Sa devise, inscrite à la « Une », n’a pas changé : « les commentaires sont libres, les faits sont sacrés » (Beaumarchais). Les maîtres censeurs de la pensée obligatoire peuvent passer au large : ils ne sont pas les bienvenus dans les colonnes du « Méridional ».

L’aventure qui nous attend est passionnante car, à vrai dire, les Marseillais et les Provençaux en ont assez d’une presse inodore, consensuelle, sans saveur et misérabiliste. Ils veulent des opinions, des débats, des polémiques, de la verve, du brio, des vérités. Ils ne veulent plus être mithridatisés à petit feu et à longueur d’antenne par les militants d’une idéologie diversitaire qui noie les différences dans le communautarisme et élève la discrimination, dite « positive », une des pires calamités de ce siècle, au rang de vertu cardinale.

Chers amis du « Méridional », voilà notre ligne et notre ambition éditoriale : restaurer une information pluraliste, porter la plume dans la plaie, rester indépendants de tous les pouvoirs constitués, et privilégier la défense et l’illustration des fondamentaux de notre civilisation, comme le fait très bien l’hebdomadaire « Valeurs Actuelles », un des derniers refuges de la liberté d’expression.

Aux sectaires habituels qui voudraient d’ores et déjà nous diaboliser, nous « Zemmouriser », pour nous disqualifier, nous répondons sereinement que nous sommes de Droite et fiers de l’être et que ce n’est pas demain la veille que nous nous en excuserons ! Nous sommes de Droite parce que nous avons la passion de la France et que nos valeurs prioritaires sont la patrie, l’ordre, la responsabilité, la liberté, la miséricorde et la famille. Et oui, nous n’avons pas changé, nous sommes de « vils réacs », comme disent les gauchistes invétérés, des conservateurs qui souhaitent défendre l’identité française, les traditions françaises, et l’héritage spirituel, historique, esthétique et intellectuel de la France.

Le « Méridional » a un idéal : la France. Une ambition : la France. Un objectif : la France. 

La belle aventure recommence. Elle me rappelle ces cris des Siciliens de Palerme qui défilaient dans les rues le lendemain des assassinats des juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino en 1992 : « ils vous ont tués mais vos idées marchent toujours sur nos jambes ». Les zélotes socialistes croyaient s’être débarrassés une fois pour toutes des lecteurs du « Méridional ». Faux. Ils sont toujours là. Pour une raison très simple, merveilleusement comprise par Jean-Baptiste Jaussaud et Francis Papazian : les idées et l’idéal du « Méridional », magnifiés par l’absence, n’ont jamais cessé de vivre. Robert Escarpit, billettiste à la « Une » du journal « Le Monde » écrivait le lendemain de la mort du général De Gaulle le 9 novembre 1970 ce sublime mot que nous pourrions évoquer à notre tour pour le prétendu décès du « Méridional » :

« Le temps gagne, en fin de compte, la partie, mais sa victoire lui échappe devant la résistance désespérée des cœurs et des imaginations qui refusent d’accepter l’inévitable. C’est peut-être cela l’immortalité… »

José D’ARRIGO –